Pour une fois, je vais faire une exception au principe de ce non-blog et réagir à chaud à l’évènement.
Ce lundi matin, la check-list du Monde.fr indique qu’une carte des victimes du financier Madoff, établie grâce aux quelques 10 000 noms communiqués sur ordre du tribunal de New-York était disponible sur le Net. Cette carte ferait ressortir les zones les plus touchées « au travers d’un code couleur allant du vert au rouge ». Je décide aussitôt de la consulter mais la connexion est impossible. Bien que la plupart des américains soient couchés, le serveur est visiblement débordé (voir ici).
Je fais donc un petit tour sur Google et me rend compte assez vite que le sport du week-end aux Etats-Unis a été de réaliser une carte des victimes de Madoff. On obtient en direct une exposition des techniques cartographiques en ligne qui va de cartes traditionnelles à des cartes relevant plus de la « néogéographie » (celle-ci étant rapidement et superficiellement définie comme l’usage des technologies géonumériques par des non-spécialistes des SIG ou de la cartographie numérique).
Voici un petit aperçu de ce que j’ai trouvé le lundi 16 février. Si vous avez d’autres exemples …
Ceux qui veulent faire leur propre carte Madoff trouveront la liste ici. Selon le New York Times, la liste publiée par le cabinet Alix Partners, en charge de la liquidation de la compagnie de Madoff, récapitule non pas les victimes avérées mais les personnes ayant répondu à sa campagne d’enquête et qui sont donc potentiellement concernées par la faillite (est-ce vraiment très différent ?).
- La carte du Wall-Street Journal est ancienne. Elle date du 5 février. Son auteur opte pour une technique classique de représentation des effectifs regroupés au code postal au moyen de cercles proportionnels avec transparence, peut-être trop faible, pour les plus grands effectifs. Travail de cartographe professionnel, qui permet de voir l’impact de l’affaire Madoff sur la côte Est, localisation privilégiée de la finance, en Floride avec Palm Beach et ses milliardaires, mais aussi de manière plus inattendue à Denver.
- Un autre type de carte se trouve ici. L’auteur qui vient très évidemment de la galaxie Mac a extrait les codes postaux de la liste, les a géocodés avec http://geocoder.us. Il a ensuite utilisé un script de NodeBox pour dessiner leurs coordonnées. La couleur des points indique le nombre de fois où un ZIP code apparaît dans le document. L’auteur se réfère au livre Visualizing Data de Ben Fry chez O’Reilly auquel il a accès via Safari Bookshelf. On est dans la « néogéographie » pure et malgré notre sympathie, on est un peu atterré par le résultat, qui illustre simplement le fait que la variation de couleur ne peut pas traduire une quantité.
- Plus convaincante est la carte du site Off the Map. D’abord ses auteurs intègrent les clients de Madoff dans le monde entier et pas seulement ceux des Etats-Unis. On trouve sur le site une carte des victimes de Madoff en Europe. Mais surtout, il utilise les outils de gestion de données et de cartographie en ligne de deuxième génération que sont Finder! et Maker!, qui offrent une sémiologie plus satisfaisante. Malheureusement les symboles ne sont pas réellement proportionnels aux effectifs. Cette mise en classe ainsi que le choix de la taille et le non-détourage des cercles ont tendance à biaiser la visualisation. La discrétisation est discutable : à 1 client correspond le même symbole qu’à 6 par exemple .
- En France, il semblerait que les seules adresses soient à Paris, mais on constate que Genève, Monaco et le Luxembourg ne sont pas loin. En Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique,en Suisse et même en Grande-Bretagne, les clients de Madoff se localisent dans plusieurs villes …
- Il y a bien sûr, l’inévitable carte interactive, ou plutôt l’interface d’affichage géographique des données, Google Maps. Celle-ci n’offre pas de vue synthétique du phénomène mais permet de localiser et visualiser les individus. Réservée pour l’instant aux Etats-Unis, je l’ai trouvée sur USLaws, site de services juridiques en ligne. Il ne s’agit pas d’une carte unique mais de plusieurs cartes régionales, qui présentent l’adresse individuelle de certains clients, à visualiser bien entendu avec Street View. L’accès à tous les noms nécessite une inscription à USLaws… Par souci de discrétion, j’ai choisi ci-dessous l’immeuble de bureaux où loge un investisseur professionnel à San Francisco, mais on peut se promener dans certains quartiers riches des villes américaines et tomber parfois sur quelques belles villas individuelles.
- Enfin, la carte de madoffmap.com étant maintenant accessible (voir le site ici), je l’ajoute à cette collection. Elle est sémiologiquement originale car elle a pour objectif de permettre la représentation de chaque individu tout en donnant une image de l’intensité spatiale du phénomène. La technique consiste à faire passer la couleur du symbole du vert au jaune puis au rouge en fonction du nombre de points qui sont dans son voisinage (10 miles à la ronde). L’effet est satisfaisant à l’échelle métropolitaine mais plus discutable à l’échelle des Etats-Unis : Denver disparaît par exemple …
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En lisant le billet de blogue http://media.baliz-geospatial.com/fr/blogue/il-faudra-commencer-par-des-punaises-sur-une-carte de Luc Vaillancourt, j’ai rapidement pensé à ce billet de cet autre blog.
Je trouve qu’il y a des réponses intéressantes sur le pourquoi des « ravages » de la néogéographie.