Quelle géomatique pour la fin du monde ? Pratique (et théorie) de la cartographie survivaliste.

Peut-on utiliser cartes et SIG pour survivre à la fin du monde ? Même si c’est un peu tard pour celle de cette semaine, la question vaut pour toutes celles qui suivront. Voici donc un petit tour d’horizon des techniques cartographiques utilisées par les « survivalistes ».

SurvivalistChacun sait que ce blog — très réactif et toujours sur la brèche, comme en témoigne le rythme haletant auquel paraissent les billets — est particulièrement attaché à suivre et décoder les effets de la mode. Celle-ci nous habille en ce moment d’un catastrophisme de bon aloi, bien adapté à cette période stressante de Noël. Les Mayas l’ont calculé, les vrais spécialistes — pas ceux du CNRS — l’ont confirmé : la fin du monde est programmée pour vendredi prochain 21 décembre. Vous le savez-tous d’ailleurs, on nous le serine sur tous les tons depuis des mois. Et si d’aventure les Mayas s’étaient trompés dans les dates, elle aura certainement lieu un peu plus tard. Il convient donc de s’y préparer avec soin. Toujours soucieux d’être utile à mes lecteurs et avec l’esprit pratique qui me caractérise, j’ai enquêté (sur le Net) auprès des spécialistes de la fin du Monde, ceux qu’on appelle en anglais les « preppers », en presque-français les « survivalistes », toutes ces personnes très organisées qui ont l’intention de survivre individuellement « à la fin du monde tel que nous le connaissons» (the end of the world as we know it, mot de passe :  TEOTWAWKI). L’article les Casaniers de l’Apocalypse de Denis Duclos dans le Monde Diplomatique de juillet 2012 fait un point sociologique et idéologique sur le sujet. J’ai voulu, quant à moi, savoir quels outils cartographiques et géomatiques ces spécialistes de la survie utilisaient pour leur altruiste projet .

Le survivalisme

Les preppers ou survivalistes sont de plus en plus nombreux, au moins trois millions aux Etats-Unis d’après Denis Duclos. Ils sont issus de tous les milieux mais se recruteraient  plus particulièrement parmi les jeunes et les catégories suburbaines endettées. Né au Royaume-Uni et aux États-Unis dans les années soixante, le mouvement survivaliste s’est progressivement étendu au monde entier, même si c’est aux Etats-Unis qu’il reste le plus puissant. Si l’on en parle beaucoup à propos de ce fameux 21 décembre, les survivalistes s’intéressent moins à prévoir la fin du monde qu’à se préparer individuellement à une catastrophe. Celle-ci peut être locale: incendie, inondation, panne industrielle, émeute urbaine…  Elle peut-être globale: météorite, collision avec une autre planète, éruption géante, explosion nucléaire, guerre généralisée, pandémie mondiale, désordres révolutionnaires ou guerres civiles à grande échelle… Voir ici une liste des menaces allant du quotidien avéré au prétendument inéluctable. Il s’agit donc de se préparer à un évènement de ce type en apprenant des techniques de survie (repérage,alimentation, médecine, chasse, construction d’abris, autodéfense). Une mouvance néosurvivaliste est apparue ces dernières années qui partage les mêmes techniques mais développe une doctrine d’organisation de la vie quotidienne visant à se rendre auto-suffisant et autonome par rapport aux systèmes collectifs et industriels et qui rejoint ainsi une vision critique de la société moderne assez proche de certains mouvements écologistes radicaux.

REM TEOTWAWKI

REM (The End of The World as You Know It (I feel fine)

On peut distinguer trois objectifs pratiques chez les survivalistes: échapper à la catastrophe en se relocalisant dans des zones susceptibles d’échapper aux troubles, apprendre à survivre en autonomie dans un monde rendu à la vie sauvage et sans technologie et se protéger des autres, par exemple les cigales n’ayant pas fait l’effort de s’organiser pour le pire qui, une fois la bise venue, risquent de se jeter comme une armée de zombies sur les valeureux preppers pour leur voler leurs biens et leur moyens de survie. Les techniques liées à l’information géographique répondent  essentiellement au premier objectif, même si on devine qu’une fois la catastrophe survenue, les outils géonumériques risquent de s’avérer inutiles. Quel intérêt de disposer des données Openstreet Map sur son Smartphone ou d’avoir installé le Service Pack 5 sur la dernière version d’ArcGIS si vous n’avez plus d’électricité? C’est donc en amont, pour préparer la survie post-apocalypse (« post-app » en langue survivaliste) qu’on peut envisager de mobiliser les ressources de la géomatique. Bien entendu, les savoir-faire cartographiques traditionnels ne sont pas à délaisser.

Survivaliste, toujours tu chériras la carte !

La carte papier, que l’on a tendance à tort à trouver obsolète, est en effet  la fidèle amie du survivaliste, puisqu’elle restera utilisable même sans électricité. Survivaliste, vous devez donc apprendre la philosophie des cartes, comme l’explique sur son blog Vol West, un survivaliste français vivant aux Etats-Unis et qui mitraille  Youtube de vidéos. Une préparation rationnelle nécessite même d’en avoir au moins trois: une carte routière de son pays, une carte routière de sa région et une carte topographique de son lieu d’habitation, auxquelles on serait bienvenu d’ajouter, celles de ses « points de chute », les endroits où l’on pense se relocaliser après la catastrophe. Certains proposent même d’ajouter des cartes anciennes, qui permettent de repérer des anciens puits, ou des structures industrielles oubliées, qui peuvent servir de repaires.

Il faut ensuit tracer sur chacune de ces cartes un cercle autour de son lieu d’habitation pour déterminer trois zones: la première de 1 kilomètre de diamètre, la seconde de 10 kilomètres et la troisième de 100 kilomètres. Sur cette vidéo, une zone 4 du territoire entier (la France par exemple) est mentionnée en sus. Il faut ensuite explorer systématiquement ces zones, surtout les zones 1 et 2 afin de répertorier tous les points intéressants, positifs ou négatifs,  à connaître en cas de situation difficile: points d’eau, arbres fruitiers,  supermarchés, bâtiments abandonnés, docteurs, armureries, fermes, centrales nucléaires, prisons … Je vous laisse consulter la copieuse liste sur le site, dont l’auteur nous dit qu’elle n’est pas complète.

La carte est aussi un élément central du plan d’évacuation que tout survivaliste digne de ce nom se doit d’élaborer. C’est sur la carte qu’il déterminera ses points de chute rapprochés et éloignés en cas « d’effondrement de la normalité ». Il devra équiper ces lieux en matériel de survie et reconnaître les itinéraires qui permettront de les rejoindre en cas de trouble. On comprend bien l’esprit et la technique sur cette vidéo à partir de l’exemple du 14ème arrondissement de Paris:

Mais l’apprenti survivaliste doit se méfier ! Même s’il ignore dans un premier temps l’immense zone 4, inventorier aussi complètement des objets aussi divers sur des surfaces aussi vastes que la zone 2 de son domicile et de ses différents points de chute risque de prendre un petit moment ! Non seulement la survie post-app ne s’improvise pas, mais elle risque d’occuper pas mal les loisirs du survivaliste. En fait chaque balade du dimanche et chaque départ en vacances vont devenir une occasion de vérifier où sont les sites intéressants pour se cacher et se nourrir en cas de problème.

Mobiliser les données cartographiques en ligne

D’autres experts proposent dans la phase pré-app où les gadgets technologiques fonctionnent encore de mettre en œuvre des techniques d’exploration numériques en complétant les cartes topographiques par des photographies aériennes copiées de Google Maps, ou même d’utiliser les GPS et les smartphones pour documenter les zones d’évacuation et de survie.

Le Web est aussi une source de données cartographiques en ligne très utile au survivaliste pour optimiser sa préparation. Il est ainsi possible de gagner du temps dans l’exploration en mobilisant l’information disponible en ligne sur la localisation des ressources et des menaces potentielles en période de pré comme de post-app. Bien entendu l’information disponible sur les sites officiels est « à manipuler avec des pincettes » comme on l’indique ici (à cause d’un risque d’explosion ?). Par exemple, ce site américain indique aux Etats-Unis, une carte de la qualité des sols, indispensable pour planifier sa « relocalisation » en fonction des potentialités d’implanter son potager.

Tout survivaliste doit aussi savoir localiser les menaces qui le guettent, en particulier grâce aux cartes sur les risques naturels et industriels publiées par les gouvernement. De nombreux sites mentionnent où vous pourrez trouver des cartes fixes ou interactives localisant les risques divers : séismes, inondations, centrales nucléaires, industries SEVESO… Certains survivalistes n’hésitent pas à y ajouter les cartes au 1:25 000 de l’Atlas des Zones Urbaines Sensibles publiées par le SIG du CIV, indicatrices selon eux du « risque urbain » en France. Une carte mondiale d’alerte est aussi utile, à cause de l’effet papillon, comme le remarque de manière aussi allusive que pénétrante un commentateur du site.

Survivalisme et SIG, une rencontre à venir ?

Rares semblent les survivalistes à s’être demandés si les techniques manuelles de dessin au crayon de couleur ou de gommettes sur des  cartes papiers n’allaient pas s’avérer rapidement inadaptées à leur objectif. Dans le cas regrettable où la catastrophe s’avérerait un peu lointaine, la mise à jour en continu des volumineuses données multi-échelles nécessaires pour préparer l’évacuation, la retraite et la survie risque d’être difficile, et les données collectées vont rapidement se trouver obsolètes. Or c’est un peu pour résoudre ce problème de données cartographiques volumineuses que les SIG ont été inventés. Mais il est évident que la culture survivaliste entre en contradiction avec la dimension technique de la géographie numérique.

J’ai trouvé sur des sites américains deux références seulement à l’utilisation des SIG par les preppers. Elles convergent toutes les deux pour en conseiller leur mise en œuvre dans un projet survivaliste, mais elles sont surtout intéressantes par les argumentaires employés et ce qu’elles disent de la géomatique.

RedHorse_Ronin dans un billet sur le Massachusetts Preppers Forum intitulé Use the Technology BEFORE It Fails (Utiliser la technologie avant qu’elle tombe en panne)  donne à ses collègues survivalistes une très concrète initiation aux SIG dont il fournit une définition simple mais évocatrice (« Les SIG c’est la cartographie sous stéroïdes« ). Le billet, visiblement écrit par un ancien militaire ou un spécialiste de la sécurité civile explique très précisément ce qui se passerait aux Etats-Unis en cas de dommage d’envergure nationale et pourquoi chacun doit acquérir une connaissance intime et directe de son environnement par la reconnaissance physique et par la documentation photographique.  Mais au-delà d’un exposé très argumenté, quoiqu’assez classique et proche de celui présenté plus haut, RedHorse_Ronin innove en défendant l’idée qu’un SIG est indispensable pour organiser et mettre en cohérence l’information collectée. C’est une technologie qui lui semble assez facile à mettre en œuvre par une ONG ou un individu motivé afin de dresser un plan d’évacuation et d’action. Pas besoin d’un logiciel comme ArcGIS, dit-il, même si en disposer serait une bonne chose. De nombreux logiciels SIG open-source font l’affaire et même une simple série de calques acétate (à la Ian McHarg, voir ici pour ceux qu’intéresse la préhistoire des SIG) serait utile. Il propose au survivaliste isolé de se rapprocher des écoles et de demander à des étudiants d’aider à élaborer ce type de plan. Selon lui, les SIG sont les outils que le gouvernement utilise pour organiser la sécurité. Il faut s’en inspirer en appliquant ces techniques à l’échelle de l’individu ou d’un petit groupe.

C’est un peu le même argument que développe Dave X sur un autre blog, Survivalblog.com (300 000 hits revendiqués par semaine) avec un plus large développement. Intitulé “I Can See You” — A Digital View of Your Survival Preparations, le texte mérite d’être lu en entier. L’idée de départ est que le survivaliste, s’il se doute que le gouvernement le surveille et le fiche à travers les permis de port d’arme qu’il demande, les colis qu’on lui livre par la poste et d’autres sources conventionnelles, croit naïvement que les autorités ignorent tout de la base de repli qu’il prépare en secret depuis des mois ou des années. Isolé dans les bois ou dans une zone rurale difficilement accessible, sans voisin à proximité, ce repaire a vocation à rester secret. Or pour Dave X,  cet endroit que le prepper considère comme sa propriété est susceptible d’être utilisé en temps de crise par le pouvoir fédéral pour ses propres besoins : il peut être interdit d’accès, inondé, occupé par les troupes, etc.. Selon lui, il est d’ailleurs déjà connu, inventorié, classé et planifié grâce au travail effectué depuis 30 ans  avec les SIG par les agences et les services de tous niveaux, même « dans les plus petits bureaux à la campagne ». Ceux-ci  ont utilisé « ArcGIS® et ArcView® » pour collecter dans leurs bases de données les informations sur la plus petite parcelle de terrain :  » la vérité est qu’ils savent où vous êtes. Ils savent qui vous êtes, ce que vous avez. Ils peuvent même déjà savoir ce que vous êtes en train de faire ou ce que vous êtes capable de faire (remerciez tous les services du gouvernements qui ont numérisé les données qui vous concernent : titres de propriété, déclarations d’impôts, extraits cadastraux, levers de géomètres, aménagement, plans d’urbanisme, commissariats, sécurité civile, chambres d’agriculture, services forestiers …) ». Et l’auteur de passer en revue les objets les plus variées intéressant un survivaliste, tous intégrés selon lui dans des couches des SIG les plus divers : sources, mares, fermes, jardins, zones humides, lignes électriques, ponts, barrages, stations de pompage … « . « Tout changement : creuser un fossé, procéder à une éclaircie dans la forêt, couper une haie …  » sera inévitablement repéré par les systèmes de monitoring aériens ou de terrain. Et l’auteur de conclure que le TEOTWAWKI a déjà eu lieu  : « Vous ne pouvez plus cacher ce que vous faites. »

Prenant acte de cette visibilité des préparations des survivalistes par le pouvoir, l’auteur propose une solution paradoxale : rendre plus efficaces les préparations en les rendant plus visibles, en les partageant avec d’autres, en s’organisant en réseaux, en se connectant de manière à faire masse. Une meilleure connaissance des SIG, voire leur prise en main et leur utilisation, serait selon lui susceptible de donner aux groupes de Preppers des plans de défense et d’action plus mobiles et plus efficaces, qui leur permettront de déjouer le contrôle du gouvernement. « Quand la planification du territoire (LIP = Land Information Planning) est un facteur de contrôle, l’usage de l’information et des technologies est plus efficace pour endiguer le flot que le fil barbelé et les balles » (« With LIP as a controlling factor, using the information and technology may be more valuable than barbed wire and bullets to stem the tide »). Selon l’auteur, c’est donc la conception classique du survivaliste, celle d’un individu planifiant de manière autonome et secrète sa survie, que la géosurveillance généralisée du territoire physique conduit  à remettre en cause .

Ces deux billets, qui datent de l’hiver dernier, n’ont semble-t-il pas eu un grand écho. Les applications survivalistes des SIG ont-elles un avenir ? On remarquera que toutes les deux vont à l’encontre de deux réflexes survivalistes de base : le non-recours à la technique et la nécessité de compter d’abord sur soi.

Extrait du « Familier de la Nature » de Gilbert Anscieau

En guise de conclusion inquiète

On sort effaré et atterré de cette plongée même très rapide et superficielle dans la littérature survivaliste. Loin des élucubrations illuminées de prophètes de la fin du monde, on découvre un réseau de militants déterminés et organisés pour se préparer à une situation de crise, locale, régionale ou globale. Si les objectifs pratiques sont communs, le survivalisme semble une mosaïque idéologique confuse et mouvante. Certains sites ne diffusent aucune idéologie explicite, hors celle  de l’action survivaliste elle-même. D’autres sont proches de courants libertariens. Mais nombre de commentaires sur les forum relèvent d’une droite extrême, violente, raciste, proche aux Etats-Unis du fondamentalisme chrétien et du suprématisme blanc. Le contenu des sites balance entre une sympathique pratique scout évoquant l’épatant « Familier de la Nature » de Gilbert Anscieau combinée avec la révolte solitaire d’un Henry David Thoreau dans sa cabane au fond des bois et une ambiance pesante de préparation militaire, dans laquelle la fascination des armes tient un rôle central (comment s’en procurer, légalement ou illégalement, comment les cacher, comment s’en servir ….). J’écris ses lignes au moment où le bruit court sur la toile que Nancy Lanza, la mère et première victime du tueur de l’Ecole de Sandy Hook aurait été une collectionneuse d’armes survivaliste.

Il faut noter que cette préparation militaire se double d’une étonnante fièvre consumériste avec un marché très actif d’objets hétéroclites, outils, armes, livres ou stages d’initiation à la survie. On se demande finalement si le danger ne vient pas plus de ceux, tel Vol West, qui proposent une approche pratique et concrète du survivalisme, sans idéologie explicite associée. Leur discours rationnel et pragmatique semble assez proche de celui de la sécurité civile et de la prévention du risque industriel. Il faut être conscient des risques de la vie moderne, dont certains sont quotidiens (accident, incendie…), d’autres plus rares (inondation, explosion chimique) et d’autres encore largement plus hypothétiques. Mais derrière la volonté apparemment louable de rendre les citoyens conscients des risques pour agir de manière responsable en cas de crise, c’est un discours différent qui émerge. Il s’agit d’amener les individus à mettre au cœur de leur existence la hantise de l’événement grave, la méfiance des autorités et du « système » et la peur de l’autre, nécessairement concurrent puisque les ressources se réduiront après la catastrophe.  Le fondement de la pensée survivaliste, quoi qu’en disent ceux qui tentent de la banaliser comme un mode de vie responsable et prudent, est la guerre de tous contre tous par le fait que la catastrophe laissera un nombre limité de survivants se partageant une terre libérée du poids des foules insouciantes. On ne peut pas imaginer 350 millions d’américains vivant chacun dans une ferme isolée du Montana. Même si des réseaux tentent de s’organiser, en particulier aux États-Unis, ce qui frappe est le caractère extrêmement individualiste de ce mouvement, dont la principale motivation est d’aider chacun à s’en sortir seul. Le seul regroupement envisageable est à l’échelle de quelques personnes ou quelques familles. Un mouvement « survivaliste » de masse n’aurait aucun sens. Cette « philosophie », même dans sa version raisonnable, ne conduit qu’à développer le chacun pour soi et à militariser les esprits. Il contribue donc à instaurer ce qu’il dit vouloir éviter, la catastrophe de la guerre civile, avec ou sans »effondrement de la normalité ».

Le rôle des cartes et de la géomatique dans ce paysage confus s’avère en revanche très clair. Les cartes sont nettement du côté des individus pour les aider dans leur contrôle de l’espace, de la tactique et de la logistique. Elles retrouvent ainsi le rôle militaire qu’elles ont depuis au moins deux siècles, en France avec  la carte de Cassini ou la carte d’État-major, mais en prenant un caractère individualiste ou de guérilla. On a basculé de manière inattendue du côté post-moderne et critique de la cartographie. Dans le survivalisme, chacun élabore sa propre carte pour ses propres besoins, comme le professe depuis longtemps Denis Wood,  mais avec un esprit vraisemblablement assez différent.  Les SIG, peu utilisés par les preppers sont eux plutôt du côté de l’Etat et du « Système ». Ils surplombent les individus et les emprisonnent, en rassemblant des informations sur eux et sur le territoire, afin de les surveiller et les contrôler. On retrouve là avec surprise les critiques des géographes sociaux émises dans « la guerre des SIG » des années 90. La question qui se pose aux survivalistes est celle de leur capacité à utiliser ces outils à leur profit, comme ont tenté de le faire les tenants de la géographie radicale qui voulurent retourner les SIG contre le pouvoir en inventant des SIG participatifs, au service des groupes marginalisés ou défavorisés. A un autre niveau, cela conduit à réinterroger, comme le fait Henri Desbois dans son récent et excellent mémoire d’HDR, le rôle que jouent les technologies géonumériques dans la militarisation des espaces urbains contemporains qu’observent et théorisent par exemple Stephen Graham ou Derek Gregory. En veillant à ne pas tomber, à notre tour, dans la paranoïa.

NB. Les vrais cartomaniaques repéreront deux dispositifs géographiques dans ce clip de REM (The End of The World as You Know It (I feel fine) qui date de 1988 : le globe au début bien sûr mais aussi aux 4ème et 5ème secondes un plan de ville appuyé au mur.

It’s The End Of The World Lyrics

by R.E.M.
from Blast From the Past Soundtrack

That’s great, it starts with an earthquake, birds and snakes,
an aeroplane – Lenny Bruce is not afraid.
Eye of a hurricane, listen to yourself churn,
world serves its own needs, dummy serve your own needs.
Feed it off an aux speak,, grunt, no, strength,
The ladder starts to clatter with fear fight down height.
Wire in a fire, representing seven games, a government for hire and a combat site.
Left of west and coming in a hurry with the furies breathing down your neck.
Team by team reporters baffled, trumped, tethered cropped.
Look at that low playing!
Fine, then.
Uh oh, overflow, population, common food, but it’ll do.
Save yourself, serve yourself. World serves its own needs, listen to your heart bleed dummy with the rapture and the revered and the right – right.
You vitriolic, patriotic, slam, fight, bright light, feeling pretty psyched.

It’s the end of the world as we know it.
It’s the end of the world as we know it.
It’s the end of the world as we know it and I feel fine.

Six o’clock – TV hour. Don’t get caught in foreign towers.
Slash and burn, return, listen to yourself churn.
Locking in, uniforming, book burning, blood letting.
Every motive escalate. Automotive incinerate.
Light a candle, light a votive. Step down, step down.
Watch your heel crush, crushed. Uh-oh, this means no fear cavalier.
Renegade steer clear! A tournament, a tournament, a tournament of lies.
Offer me solutions, offer me alternatives and I decline.

It’s the end of the world as we know it.
It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it (It’s time I had some time alone) and I feel fine.
(I feel fine)

It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it (It’s time I had some time alone) and I feel fine.

The other night I dreamt of knives, continental drift divide. Mountains sit in a line
Leonard Bernstein. Leonid Brezhnev. Lenny Bruce and Lester Bangs.
Birthday party, cheesecake, jelly bean, boom!
You symbiotic, patriotic, slam book neck, right? Right.

It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it (It’s time I had some time alone) and I feel fine.

It’s the end of the world as we know it.
It’s the end of the world as we know it.
It’s the end of the world as we know it (It’s time I had some time alone) and I feel fine.

It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it (It’s time I had some time alone) and I feel fine.

It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it. (It’s time I had some time alone)
It’s the end of the world as we know it (It’s time I had some time alone) and I feel fine…

2 réflexions sur “Quelle géomatique pour la fin du monde ? Pratique (et théorie) de la cartographie survivaliste.

  1. Pingback: Gravity, film géospatial/Geospatial Movie | (e)space & fiction

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